mardi 24 avril 2007

Monographie Infirmière Libérale

INTRODUCTION


Fort peu d’études se sont attardées sur le métier d’infirmière libérale. Ce fait est a priori plutôt étonnant, compte tenu de la place particulière qu’occupent, au sein des interventions médicales à domicile, les quelques 55 000 professionnels en exercice en France aujourd’hui...Les femmes représentant, environ 86 % de ces professionnels exerçant en libéral.

A l’heure actuelle, on assiste à de nombreuses mutations au sein de ce groupe. En effet, selon les propos de professionnels ; le métier d’infirmière libérale évolue dans le mauvais sens car nous assistons de plus en plus à une dévalorisation du travail. Les pratiques des infirmières libérales se limitent de plus en plus à de simples travaux d’aides ménagères ou psychologiques.

J’ai choisi d’effectuer ce travail sur les infirmières libérales, car souffrant de la maladie de Crohn depuis 2 ans, je voulais faire un clin d’œil à ces femmes qui ont sues être là pour moi dans les moments difficiles.

La monographie que je vais vous présenter se décline en 3 parties complémentaires.

La première, fondée sur une recherche bibliographique, portera sur l’histoire de ce groupe, le mode de recrutement, les modes d’exercice de l’infirmière ; de plus nous étayerons notre argumentation par quelques chiffres.

Puis dans une deuxième partie sera consacrée au portrait emblématique d’une infirmière libérale tiré d’une interview menée dans un cabinet d’infirmières libérales situé à Compiègne dans l’Oise.

Enfin, dans une troisième et dernière partie, nous tenterons de repérer à partir d’une analyse de la presse, un enjeu actuel et central concernant ce groupe ; avant de passer à une conclusion générale où nous émettrons des hypothèses quant à l’avenir de la profession.






I- Recherche bibliographique

1-Historique du métier d’infirmière libérale

Le métier d’infirmière libérale, au sens strict du terme, n’émerge qu’à la fin de la Seconde guerre mondiale, et ses effectifs seront durant les années 1950-1960 encore très réduits.
Historiquement l’apparition du concept d’infirmière a vu le jour à la fin du XIXème siècle au sein du monde religieux.

Les augustiniennes en particulier, étaient très présentes dans les hôpitaux et les hospices qui se développent tout au long des années 1850-1880. De la cuisine au cellier, de la lingerie aux immenses dortoirs où les malades sont alités, ces religieuses s’affairent à la tâche.

Les premières écoles s’ouvrent dans les années 1870-1880.Très vite,on utilisera l’appellation d’infirmière visiteuse d’hygiène sociale. Ces dites infirmières visiteuses doivent beaucoup aux initiatives de médecins hygiénistes qui vont entreprendre avec méthode une lutte sans merci contre la tuberculose.

En 1905 Léonie Chaptal inaugure à Paris la première « maison école d’infirmières privées » qui va former spécialement des « infirmières visiteuses de la tuberculose » aptes à aller au domicile. Peu à peu , un nouveau métier se développe même si les effectifs sont fort modestes. Certes quelques autres écoles vont s’ouvrir mais en 1914, il n’y a pas au total plus de 500 infirmières en France.

A partir de 1947 marque la naissance officielle du métier d’infirmière libérale. Il fallait, pour exercer, s’être fait enregistrer à la préfecture et posséder une carte professionnelle. Au jour d’aujourd’hui nous pouvons sans conteste dire que l’histoire proprement dite du métier d’infirmière libérale reste à faire étant donné qu’il s’agit encore d’un métier « jeune ».
2- Le mode de recrutement
Pour passer le concours d'infirmière, il faut être âgé d'au moins 17 ans et être titulaire du baccalauréat. Lorsque l'on ne possède pas le baccalauréat, il est possible dans certaines conditions (justifier d'un travail pendant 3 ans dans le secteur hospitalier ou de 5 ans dans un autre secteur) de passer le concours après autorisation de la DRASS. La validation des acquis de l'expérience (VAE) devrait se mettre en place à moyens termes et permettra vraisemblablement une plus grande souplesse

dans l'accès à la formation. La durée des études est un peu plus de 3 ans, soit 4760 heures. La formation en soins infirmiers a la particularité d'être une pédagogie de l'alternance, qui vise à faciliter une certaine professionnalisation par l'articulation qu'elle offre entre la théorie et la réalité pratique.
Les stages sont diversifiés et permettent le développement de compétences dans les différents secteurs (pédiatrie, chirurgie, psychiatrie ...), en hospitalier ou extra - hospitalier. L'étudiant est alors encadré par l'équipe soignante avec un infirmier référent. Les cours théoriques sont assurés par des professionnels : cadres de santé en IFSI ou en unité de soins, médecins, psychologues, juristes... La multiplicité des intervenants est liée à la diversité des disciplines : anatomie, pharmacologie, législation, éthique, sciences humaines, soins infirmiers aux personnes atteintes d'affections cardiologiques, digestives ... 30 modules sont ainsi abordés au cours des 3 ans. L'évaluation des connaissances et des aptitudes des étudiants est effectuée tout au long de leur formation au moyen d'un contrôle continu des connaissances théoriques, des connaissances cliniques et des stages. La formation d'infirmier est sanctionnée par le diplôme d'Etat d'infirmier. Les épreuves de ce diplôme d'Etat sont un travail écrit de fin d'études et une mise en situation professionnelle.
3- Les modes d’exercice de l’infirmière libérale
Le diplôme d'Etat ouvre les portes de toutes les structures de soins qui ont un besoin d'infirmières, qu'elles soient publiques ou privées, hospitalières ou extra- hospitalières (PMI, infirmière d'entreprise, infirmière scolaire...) Quelle que soit la structure, le salaire de départ est sensiblement le même, soit : 1400 € à 1500 € . Pour s'installer en libéral, il est obligatoire selon la législation actuelle de cumuler une expérience de 4 800 heures (en services de soins). Cette exigence me semble tout à fait cohérente en égard aux responsabilités qu'une infirmière doit assumer et aux différentes décisions qu'elle doit prendre. Dans un service de soins, lorsque vous avez une interrogation ou un doute, vous demandez conseil auprès d'une collègue plus expérimentée. Lorsque le problème semble plus important, un médecin est toujours joignable.
L'activité libérale présente certains avantages : elle permet une conception de soins où l'aspect relationnel peut prendre toute sa dimension. Le patient est chez lui, il conserve ses repères, sa façon de vivre. L'infirmière libérale partage donc cette intimité, et va s'adapter aux habitudes du patient. Il s'établit le plus souvent une relation de confiance de grande qualité. Le travail d'une infirmière libérale est conséquent, le plus souvent elle démarre tôt le matin (6 h), s'arrête vers 12 à 13 h pour reprendre sa tournée vers 16 h jusque parfois 20 h à 21 h.
La nécessité de la continuité des soins auprès du malade oblige une infirmière libérale à s'associer, sinon elle ne bénéficiera d'aucun repos. Cette association permet des organisations plus compatibles avec une vie familiale. La rémunération est fonction de l'activité mais tourne autour de 2 000 euros net/mois.
4- L’évolution du métier en chiffres (cf Annexes)

Selon les différentes sources observées,nous pouvons dire que le nombre d’infirmière libérale augmente de façon régulière depuis la dernière décennie : 46 750 en 1999 ; 47 750 en 2002 pour atteindre 55 000 aujourd’hui.

En 2003, la tranche d’âge représentant la plus grande part d’infirmières libérales est la tranche 42-47 ans avec 25,5 % d’infirmières.

De plus, la répartition des infirmières libérales et des infirmiers libéraux par tranches d’âge en 2003 est semblable.

De par l’observation de l’origine sociale des infirmières libérales selon la profession de leur père,retenons que l’hétérogénéité des horizons sociaux est frappante. 19,7 % des infirmières libérales ont un père agriculteur , 17,1 % un père cadre et 15 % ont un père ouvrier.

En ce qui concerne l’origine sociale des infirmières libérales selon la profession de leur mère, on note cette fois ci certaines disparités. 31,4 % des infirmières libérales ont une mère employée contre seulement 6,3 % de mère cadre. Notons que 5,7 % des infirmiers libéraux ont une mère agricultrice.

Observons finalement, les principales raisons qui poussent les infirmières à choisir l’exercice libéral. Hommes et femmes classent en premier la teneur des relations avec les patients. Pour autant l’écart subsiste dans leurs réponses. Les femmes sont plus sensibles aux horaires de travail. Les motivations masculines sont, quant à elles, plus marquées par la satisfaction de monter son affaire et les revenus plus conséquents.

II- Portrait d’une infirmière libérale

Pour effectuer cette interview, je me suis permis de solliciter une infirmière libérale et lui ai soumis une série de questions relatives à son activité . J’ai également inclus dans cette partie la courte vidéo d’une consultation type d’une infirmière (Cf Annexes) , collectée sur internet. Cet élément me parait indispensable, pour permettre aux lecteurs de mieux percevoir la réalité quotidienne de ce métier, et rend cette analyse plus attrayante.

1- Entretien avec une professionnelle (cf Annexes)

III- L’infirmière libérale vouée à devenir un « Manager de soins à domicile »

A l’heure actuelle le métier est marqué par de profondes mutations au vu des évolutions démographiques. En effet, nous assistons de plus en plus au développement de l’aide à domicile au sein même de l’activité. Le métier d’infirmière libérale « solitaire » tend à disparaître pour laisser place à un métier que l’on peut définir comme étant « manager de soins à domicile ».

Selon Monsieur Marcel AFFERGAN, Président de Convergence Infirmière, « les entreprises libérales de proximité, offriront, à domicile, à la fois des services d’aide et de soins aux personnes ». De ce fait, nous devrions voir apparaître des « entreprises infirmières libérales de proximité » qui pourraient salarier des infirmières, des aides-soignantes, des auxiliaires de vie et des aides ménagères. L’infirmière libérale, proprement dite, aurait donc un travail davantage orienté vers la gestion d’entreprise au détriment des soins infirmiers.

Cependant, de nombreux avis divergents se manifestent sur cette question. D’un côté , selon Yves BUR, député du Bas-Rhin et vice-président de l’Assemblée Nationale, l’infirmière libérale du XXIème se doit de pratiquer une prise en charge sociale de sa clientèle et non plus se limiter aux soins médicaux. D’un autre côté, la Fédération Nationale des infirmiers, par la voix de sa Présidente, Elisabeth BIAIS-CANHOYEA , s’insurge contre de telles propositions. « Pour le maintien optimal à domicile de la personne, malade, dépendante, âgée, handicapée, l’infirmière libérale doit assumer la coordination avec les différents intervenants sociaux et non se substituer à eux ».

A mon avis, l’activité d’infirmière libérale ne peut pas seulement se limiter à soigner les patients sans mettre en avant une aide psychologique précieuse dans la guérison des malades. Les personnes âgées sont au centre du débat, il faut avouer que pour ces patients du 3ème âge ont davantage besoin d’un soutien psychologique au quotidien, que des soins médicaux. L’infirmière libérale sera donc contrainte à allier ces deux aspects de la profession si elle souhaite élargir sa clientèle et assurer la pérennité de son activité. Selon moi, cela me parais évident qu’une infirmière ne doit pas se cantonner à des soins médicaux tels que pansements ou piqûres, mais également offrir à ses patients une prise en charge sociale, qui peut souvent s’avérer comme étant « la clé primaire » de la guérison.


CONCLUSION


Les métiers de la santé sont à l'heure actuelle une véritable manne d'emplois. Différents éléments expliquent cette situation.

D'une part, les besoins en santé évoluent et ont considérablement augmenté. Grâce aux progrès médicaux, on vit plus longtemps...

En 2040, plus d'un tiers de la population aura 65 ans et plus. Ces années de vie en plus nécessitent bien évidemment un suivi médical régulier et des soins infirmiers spécifiques afin d'assurer une qualité de vie optimale. Même si l'on vieillit mieux, la personne âgée est le plus souvent polypathologique. Cette polypathologie est inéluctablement génératrice d'une augmentation des besoins en santé.

Le paysage épidémiologique est donc en pleine évolution et sera vraisemblablement générateur de nouveaux métiers. Aujourd'hui, les métiers d'aide à domicile se développent. Demain, il est très probable que d'autres métiers apparaissent aussi, au regard des besoins de la personne soignée : auxiliaire de vie spécialisée auprès du patient Alzheimer, infirmière plus spécialisée auprès de patients diabétiques ?

D'autre part, la pyramide des âges n'épargne pas les soignants. D'ici à 2015, une infirmière sur 2 sera en retraite ! Le secteur infirmier n'est pas le seul touché, tous les métiers de la santé sont atteints. Autant de raisons qui font que le métier a encore de beaux jours devant lui, une pénurie d’infirmière libérale est donc à prévoir dans les années à venir…







ANNEXES

L’infirmière libérale en chiffres

















BIBLIOGRAPHIE





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